Tenseur
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Un tenseur est un objet mathématique. Les tenseurs généralisent les notions de vecteur et de matrice, ou, plus abstraitement, d'application multilinéaire. Ils ont été introduits par nécessité, en physique, pour représenter l'état de contrainte et de déformation d'un objet solide soumis à des forces, d'où leur nom (tensions). Cette notion est beaucoup utilisée en relativité générale et en mécanique des fluides.
Il y a essentiellement deux approches de la notion de tenseurs. L'une, pragmatique, des physiciens et des ingénieurs, présente un tenseur comme un ensemble de nombres (une sorte de super-matrice) qui se transforme d'une certaine façon selon les changements linéaires de coordonnées. L'autre, plus abstraite, des mathématiciens qui définissent les tenseurs de façon absolue, c'est-à-dire indépendante du choix d'un système de coordonnées, comme éléments du produit tensoriel ou du produit alternatif d'espaces vectoriels ; les nombres utilisés par les physiciens ne sont que les coordonnées de ces éléments-tenseurs.
L'intérêt des tenseurs en physique est que leurs caractéristiques sont indépendantes des coordonnées choisies. Ainsi, une relation entre tenseur dans une base sera vraie quelle que soit la base utilisée par la suite. C'est une caractéristique fondamentale pour la relativité générale.
Sommaire |
Approche vulgarisée (par les coordonnées)
Notion de tenseur
Exemples à l'ordre 1, 2 et 3
Lorsque l'on dispose d'une base d'un espace vectoriel E sur un corps , tout vecteur de cet espace peut se décrire par ses coordonnées dans cette base. De même, une application linéaire entre deux espaces vectoriels, lorsque l'on a une base de chacun de ces espaces, peut se décrire par une matrice.
Ainsi, dans une base donnée, le vecteur
sera décrit par ses composantes (u1, u2, u3). Si l'on change de base, les composantes (les nombres u1, u2 et u3) changent, mais le vecteur
reste le même. Le tenseur représente l'ensemble des représentations de
dans toutes les bases. Un vecteur est un tenseur dit « d'ordre 1 ».
Une application linéaire ƒ d'un espace E vers un espace F est décrite par une matrice M dont les coefficients dépendent de la base de E et de celle de F. Le tenseur représente l'ensemble des représentations de ƒ dans toutes les bases. Une matrice est un tenseur dit « d'ordre 2 ».
Un scalaire est un simple nombre, qui ne dépend d'aucune base. On dit que le scalaire est un « tenseur d'ordre 0 ».
Généralisation
Une autre manière de voir est la suivante : une matrice M peut se noter par ses coefficients (Mij ), ou plutôt (Mij ), voir plus loin — soit deux indices —, un vecteur par ses composantes (ui ) — soit un indice —, et un scalaire a simplement par lui-même — soit zéro indice. On peut envisager des objets définis avec trois, quatre, n indices (Aijk…). Un objet défini par n indices est un tenseur d'ordre n.
Sur un espace vectoriel de dimension finie m, chaque indice peut prendre les valeurs de 1 à m. Un tenseur d'ordre n sur cet espace vectoriel a donc mn coefficients. Si le tenseur « relie » n espaces vectoriels de dimensions différentes m1, m2, … mn , alors le tenseur contient ∏i = 1,…n mi coefficients.
Un tel tenseur d'ordre n représente une application multi-linéaire de dans
:
On retrouve les coefficients du tenseur T en identifiant
Changements de base
Vecteurs d'un espace à 3 dimensions
Dans la base , les composantes du vecteur
sont (u1, u2, u3). Dans la base
, elles sont (u'1, u'2, u'3). On cherche comment passer de l'une à l'autre des représentations.
Dans la base B, les vecteurs de la base B' s'écrivent :
Par définition d'une base, chaque vecteur se décompose selon une combinaison linéaire unique des vecteurs de B'. On peut ainsi définir la matrice de changement de base P de B vers B' :
les colonnes de la matrice de changement de base sont les coordonnées des vecteurs de l'ancienne base dans la nouvelle. On a alors
et
.
Lorsque les deux bases B et B' sont orthonormées, P vérifie en outre
- P − 1 = tP.
Le changement de base se fait par multiplication d'une seule matrice de changement de base, le tenseur est dit d'ordre 1.
Matrices et applications linéaires
Une matrice M représente une application linéaire ƒ d'un espace vers un autre pour une base donnée dans chaque espace. On peut donc changer de base dans l'espace de départ et dans l'espace d'arrivée. On peut donc définir deux matrices, P1 et P2 pour chacun des espaces. La matrice M' représentant ƒ pour les deux nouvelles bases se calcule donc en faisant
Le changement de base se fait par multiplication de deux matrices de changement de base, le tenseur est dit d'ordre 2.
Composantes covariantes et contravariantes
Formes linéaires et changement de base
Considérons un espace à trois dimensions muni d'une base non orthogonale (on va la supposer normée pour simplifier la présentation). En effet, il y a de nombreux exemples dans la nature où il y a des axes « naturels » qui ne sont pas orthogonaux, par exemples les axes de certains cristaux. En fait, lorsqu'un phénomène est anisotrope, on peut souvent trouver des axes dits « principaux » pour lesquels les calculs se simplifient, et ces axes ne sont pas toujours orthogonaux.
Considérons une forme linéaire ƒ sur cet espace, qui à un vecteur associe un scalaire
(les indices relatifs à la forme linéaire sont notés en haut pour permettre de les distinguer). Considérons la base , dite « base duale », définie par
on a alors
soit
si i = j
sinon
Si l'on définit le vecteur
on peut alors écrire
La base des fonctions g i « produit scalaire par »
est une base des formes linéaires de l'espace ; on identifie souvent cette base de fonctions (g i ) avec la base de vecteurs elle-même. L'espace vectoriel formé par les formes linéaires est appelé « espace dual » ou « espace réciproque ».
Si l'on fait un changement de base de l'espace direct, alors les composantes du vecteur se transforment selon
où p ji est le coefficient de la matrice de changement de base (noté eji dans le paragraphe précédent). En revanche, les composantes de se transforment selon
on voit que dans le cas du changement de la base de formes linéaires, on multiplie par la matrice de changement de base, alors que dans le cas du changement de la base de vecteurs, on multiplie par sa transposée.
On voit donc que l'on a deux types de composantes. D'une part des composantes de type « vecteur », notées avec un indice en bas (par exemple ui ), obtenues par projection du vecteur sur les axes parallèlement aux autres axes, et se transformant lors d'un changement de base par le produit de la transposée de la matrice de changement de base (P). Ces composantes sont dites covariantes.
D'autre part des composantes de type « forme linéaire », notées avec un indice en haut (par exemple ƒi ), obtenues par projection sur les axes perpendiculairement aux axes ( et
sont perpendiculaires à
), et se transformant lors d'un changement de base par le produit de la matrice « directe » de changement de base (P). Ces composantes sont dites contravariantes.
D'après la formule de changement de base des matrices, on voit que celles-ci sont une fois covariantes, une fois contravariantes, on devrait donc noter Mi j. Toutefois, on n'utilise que rarement cette notation tensorielle pour les matrices.
Convention d'Einstein
Un tenseur peut avoir des composantes covariantes et contravariantes, ce qui explique que certains indices soient notés en haut et d'autres en bas, par exemple Tlmn.
On adopte souvent la convention de notation d'Einstein qui consiste à sommer lorsqu'un indice se trouve en haut et en bas dans un produit, par exemple
et
se notent respectivement
et
Voir aussi
Liens internes
- Champ tensoriel
- Produit tensoriel
- Tenseur des contraintes
- Tenseur des déformations
- Tenseur des taux de déformations
- Tenseur métrique
Liens externes
Articles de mathématiques en rapport avec l'algèbre linéaire |
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